Présentation

L’Atelier d’écriture de Solliès-Pont a commencé en septembre 2018 à l’initiative de Tristan Choisel, auteur de théâtre et de chansons. Pourquoi ? Pour s’initier à l’écriture de formes brèves (nouvelles, saynètes…), pour perfectionner son style ou pour simplement explorer son potentiel créatif. Nous sommes sept à partager nos textes dans la bienveillance, un peu d’humour et toujours avec beaucoup de plaisir. L’association « L’Atelier de Solliès-Pont » abrite cette initiative et vous pouvez nous rejoindre si, comme nous, vous avez l’âme d’un écrivain amateur.

Ce blog est la mémoire de notre travail. Il sert à mettre en lumière quelques-uns de nos textes. Enfin, il permet de communiquer entre nous plus facilement.

mercredi 28 juin 2023

Maudit pays !

Ça se passe dans un pays maudit.
Un pays oublié, endormi, un pays qui dort mais ne rêve pas ; ou alors où les rêves sont des cauchemars. Qu'espérer d'autre du gris de ce ciel, du crachin et du vent qui vous gifle, une claque après l'autre sans répit.
Cette histoire ce n'est pas celle des trois petits cochons, non, c'est une histoire bien sordide. Une histoire pétrie de la boue des cours de fermes.
Ce pays c'est la Champagne, la Champagne Pouilleuse.
Ce n'est pas très glorieux ! Ça ne pétille pas très longtemps.
Ça vous écrase, ça vous enlise plutôt.
C'est une histoire de lisier et de sorcière dont ce pays est encore friand.
Comment imaginer un conte plus noir ? D'une noirceur dévorante.
Donc c'est l' histoire de La Marne et de ses frustres habitants, la fable de ce porcher dévoré par ses cochons.
Morale de cette histoire : " Tous les hommes sont des cochons."



Christiane.


Consigne : texte écrit en atelier avec consigne



lundi 19 juin 2023

A la tienne!

Tu n’y as vu que du feu quand je t’ai appelé. Tu t’es dit, ce couillon ne m’en veut même pas, il m’invite à boire une bière. Ne ris pas, je te connais bien, mais toi tu me connais vraiment mal. Soit disant c’était une blague, une blague de potache comme au bon vieux temps. Le problème c’est que nous avons vieilli et que tout devient plus sérieux.

Tu es vraiment doué ! Tu as voulu tester mes capacités de résilience conjugale. Alors, avec ma femme, vous vous êtes dit, on va s'amuser sur le dos de Jacques, mon vieux pote. Ta mise en scène était plutôt réussie. Tiens, là tu ne ris plus. Oui, je reviens à ce que je disais. Mais comment jouer ? Vous avez dû chercher un moment ou alors pas du tout.

Pour cette représentation, j’avoue, je vous mettrais une bonne note et des émoji cœurs. Cœurs, c’est contextuel uniquement. Sylviane t’avait préparé un apéro particulièrement raffiné. Oui, je sais. C’était pour s’entraîner à son concours de cuisine. Pourquoi pas. Après je ne sais pas si sa tenue aurait été adéquat pour ce concours. Bref. C’est vrai, je devais être en déplacement ce soir là, mais pardon, il a été annulé au dernier moment. Que fait le couillon de service dans ces cas là ? Il rentre chez lui. Tranquille ! Et là, il trouve son meilleur ami en train de rouler une pelle à sa femme. Quelle bonne blague !! Et tu aurais voulu que je ne te casse pas le nez ? OK je ne vous ai pas laissé le temps de vous expliquer, mais pour entendre vos fadaises, j’ai bien fait de cogner avant, après cela aurait été la mâchoire avec.

- C’était un jeu mais t’as pas d’humour !





Consigne pour le 26/05/23 : Excipit – T’as pas d’humour ( seule réplique du personnage après monologue du premier) 

Catherine

 

dimanche 18 juin 2023

Lendemain de fête



Emilie sortit de sa chambre l’esprit encore embrumé après sa courte nuit de sommeil. La veille la soirée s’était éternisée et avait été bien arrosée.

Arrivée au rez-de-chaussée l’état de la maison la désola. Il y avait des verres, des assiettes et des plateaux qui trainaient dans un effroyable désordre ; le sol était jonché de résidus alimentaires et de nombreuses tâches reflétaient la diversité des boissons servies.

Elle en avait la nausée, mais il fallait bien commencer à tout ranger et nettoyer avant le retour des parents. Sinon plus d’autorisation.

Parvenue à la cuisine, elle eut la surprise de découvrir un garçon assis à la table, endormi, la tête posée sur ses bras. Elle en fit le tour et n’arriva pas à savoir qui cela pouvait être.

Elle le secoua pour le réveiller. Il fut tout aussi surpris qu’elle de se trouver là.

- Mais qui es-tu ?

- Et toi qui es-tu ?

- Ben je suis chez moi. D’où sors-tu ? Je ne te connais pas.

- J’ai suivi des copains et je me suis retrouvé à ta soirée. Euh, j’ai bien l’impression qu’ils sont repartis en m’oubliant ici ! Il faut dire que j’en tenais une bonne !

- Eh bien finalement ça tombe bien ; tu vas m’aider à tout remettre en ordre. Après on sautera dans la piscine pour nous rafraîchir les idées et faire plus ample connaissance !!



Martine F.


Consigne : Un personnage qui se lève le matin et qui découvre chez lui quelque chose ou quelqu’un de tout à fait inattendu.

La cape rouge

Depuis qu’il a regardé plusieurs épisodes d’un dessin animé à la télévision, Eric voudrait acheter la figurine d’un personnage qu’il aime bien. 

Ce jour-là il a réussi à décider sa maman : les voici dans le magasin !

Il est émerveillé de voir que tous sont là sous ses yeux.

Après avoir longtemps hésité, il en saisit un et avec sa maman il se dirige vers la Caisse.

La file d’attente est impressionnante !

Sa maman n’est pas très contente mais Eric est tellement heureux.

Petit à petit les clients avancent. Ouf ! Il n’y a plus qu’une personne devant eux. 

Au moment où Eric pose la figurine sur le tapis, il s’écrie : “Je me suis trompé, je voulais celui avec la cape rouge !



Bernadette

Consigne : le personnage change d'avis au dernier moment.

jeudi 15 juin 2023

Retour

Elle essaie de se maintenir debout malgré le tumulte de son cœur. Elle ne tient que parce qu’elle s’appuie sur le chambranle de la porte. Elle peine à réaliser que c’est bien l’homme qui l’a quittée il y a déjà bien des années sans explication. Il était toute sa vie. Elle l’adorait, ne pensait, n'agissait que par et pour lui. Elle le regarde encore et encore, là, sur le seuil de sa maison sans même penser à lui dire d’entrer. Il a vieilli bien sûr, mais c’est bien lui. Elle aimerait mettre ses mains sur ce visage tant de fois caressé mais elle ne peut que se raidir afin de ne pas tomber. Elle cherche quelque chose à dire mais les mots ne franchissent pas ses lèvres. La confusion dans son esprit est telle qu’elle ne saurait d’ailleurs par quoi commencer. Comme en accéléré lui reviennent les images de la vie d’avant : l’amour, les rires, les folies, la tendresse, puis le chagrin, la douleur, le manque, la tentation du néant. Il avait été son soleil, il fut sa nuit. Une pensée l’effleure : tout recommencer comme si rien n’avait été ?

Peu à peu son cœur se calme. Elle le regarde, lui sourit. Et elle referme la porte.






Anne

Méprise

Il cherchait depuis un bon moment l’adresse qu’on lui avait donnée, quand quelqu’un lui a dit, c’est tout droit, deuxième porte à gauche. Vous verrez, vous ne pouvez pas vous tromper. C’est ce qu’il a fait. Il sonne, la porte s’ouvre. Il entre et se retrouve au milieu de gens qui discutent, rient, tout en buvant des cocktails. Il ne comprend pas. Il a dû se tromper de porte. Il devait simplement déposer un paquet chez un client qu’il ne connaît pas. Il est livreur d’objets de valeur.

Il tente de ressortir mais une femme vient vers lui et le remercie d’emblée, avec un grand sourire : « c’est trop gentil, vraiment, il ne fallait pas ». Il veut lui dire qu’il y a erreur, mais elle le prie de déposer le paquet sur la table là, près de l’entrée. Il ne sait que faire. Reprendre le paquet et partir ? Il hésite. Elle insiste, « venez vous joindre à nous lui dit-elle, vous prendrez bien quelque chose ? » Embarrassé, il s’avance et prend le verre qu’on lui tend. Il aimerait vraiment repartir pour faire sa livraison, mais elle se tourne vers lui et lui dit : « vous êtes nouveau ? Je ne vous ai encore jamais vu ici. Depuis quand travaillez vous avec nous ? » Il bafouille, ne sait comment lui expliquer la méprise quand un homme s’approche d’eux et dit : « venez, ma chère, je vais vous présenter à notre PDG »





Anne



dimanche 11 juin 2023

Un brin de jasmin

Louise regrette le temps qui passe. Elle regrette tout le temps ce qui est derrière. L’instant passe comme un éclair, elle le traverse et aussitôt le regrette.
Depuis toujours, elle pense au temps qui passe, qui reste…
Enfant déjà, cette conscience là, du temps lui déchirait l’âme. Elle voulait retenir l’été, l’été mourait si vite ! Elle savait qu’elle ne pourrait pas le retenir. L’été fuyait toujours. Les vendanges étaient là, les grappes tombaient dans les paniers d’osier puis les vignes flambaient. Le temps d’un soupir, l’hiver arrivait. L’hiver, elle ne l’aimait pas. Pourtant il y avait des instants suspendus, le matin de Noël dans l’odeur de sapin, la couleur des tabliers d’écolière, la lecture, la lecture surtout… Et puis tout s’enchaînait, les premières pâquerettes, les souliers vernis, le rameau de fruits confis béni à l’église. Enfin l’été revenait, elle ne vivait plus que pour s’abandonner à son soleil, se laisser crucifier par sa chaleur, inerte sous son poids si lourd ; mais il lui avait fallu renoncer aux couronnes de fleurs du joli mois de Mai… Le jasmin s’était si vite flétri…

 

 

Christiane.

Consigne : incipit : « Louise regrette le temps où »

Un visage

Elle s'attarde sur cette photo, s'en approche, s'en éloigne, y revient encore et encore. Elle voudrait percer le mystère. Elle scrute ce visage qui presque s'efface. Elle le regarde fixement. Puis replace la photo dans l'album, tourne la page. Mais quelque chose d'obsédant la hante. Elle reprend la photo, maintenant tout à fait persuadée que le regard de sa mère dissimule un secret. Un secret qui va l'habiter.
L'énigme de ce visage jamais élucidée.
Une vie entière a tourner autour de ça.


Christiane


Consigne : titre : Un visage


mercredi 7 juin 2023

Au fil de l'eau






J’aime aussi l’eau douce, plus fade que l'eau salée, je l'aime avec tendresse.
Des résurgences de l’enfance viennent abreuver ma mémoire.

L’eau dormante du grand bassin troublée par les poissons rouges; veillés par ma grand-mère.
L’eau claire du bassin d’arrosage chez mes parents; m’y baignant si souvent enfant, les longues après-midis d’été; que le ciment faisait saigner mes pieds.
L’eau fluide du grand lavoir communal. Marie, ma grand-tante y lavait ses immenses draps blancs, ensuite elle les battait de son grand battoir de bois, avant de les étendre. Avec Annie, ma petite cousine, on la soulageait un peu en portant seaux, savon… Dans de grandes flaques de rire on s’aspergeait à tue-tête, improvisant de grandes parties de cache-cache derrière les draps suspendus dans le vent. Le lavoir réunissait une petite communauté de femmes et d’enfants dans des grandes éclaboussures joyeuses. Nos grands-mères s’y éreintaient collectivement.
L’eau bouillante ruisselait des lessiveuses, le lundi dans la maison de mon enfance. Aujourd’hui, solitaires les femmes regardent tourner le tambour de leur machine.
Je me souviens :
L’eau fraîche des terrasses arrosées pour rafraichir des canicules le soir venu.
L’eau limpide du ruisseau où fleurissaient pâquerettes et boutons d'or.
L’eau vive de la source dans la colline parsemée de narcisses sauvages.
L’eau violente, le jour où mon père m’en a jeté un verre au visage.
L'eau indomptée des torrents de montagne.
Les eaux perdues, avant l’accouchement, coulent doucement de mon corps étonné.
Plus tard je me suis éloignée du territoire de l’enfance et j’ai appris d’autres paysages.




Christiane.


thème du premier trimestre : "L'écume de la mémoire".