Présentation

L’Atelier d’écriture de Solliès-Pont a commencé en septembre 2018 à l’initiative de Tristan Choisel, auteur de théâtre et de chansons. Pourquoi ? Pour s’initier à l’écriture de formes brèves (nouvelles, saynètes…), pour perfectionner son style ou pour simplement explorer son potentiel créatif. Nous sommes sept à partager nos textes dans la bienveillance, un peu d’humour et toujours avec beaucoup de plaisir. L’association « L’Atelier de Solliès-Pont » abrite cette initiative et vous pouvez nous rejoindre si, comme nous, vous avez l’âme d’un écrivain amateur.

Ce blog est la mémoire de notre travail. Il sert à mettre en lumière quelques-uns de nos textes. Enfin, il permet de communiquer entre nous plus facilement.

lundi 4 décembre 2023

Là- bas si j'y suis


 
Aout 2003, c’est l’été de la canicule. Une terrible canicule, 40 degrés ! 
L’herbe est sèche, rase, le causse caillouteux. Il n’y a même pas un souffle pour soulever la poussière sur ce plateau austère du Larzac.
Paul, Michel, Alain font la queue devant les citernes pour le ravitaillement en eau. 
Jöelle, Françoise et moi avons mis les enfants encore petits à l’abri du soleil sous une vaste tente où des Kurdes en costume traditionnel se tiennent par la main, dansent et chantent en cercle. On craint quand même que cette chaleur irrespirable leur donne la fièvre. Et si une envie se mettait à nous tenailler le ventre pour une évacuation pressante, comment faire ?  Il y a bien des cabines Algeco, elles nous rebutent mais il faudra s’y résoudre. Tant pis, il ne faudra pas traîner, on se pinçera le nez, se dit-on dans un fou rire.  Pas encore de toilettes sèches en ce début des années 2000.
Au cœur de cette déferlante de 150 000 personnes : jeunes, vieux, paysans, urbains, femmes, enfants ; on se sent accordés. Une sensation d’ébriété a en être. 
D’autres ont du rebrousser chemin, après bien souvent des heures de voiture car le site est saturé. Sous des banderoles arc en ciel, on lie conversation avec la diversité du monde, avec des jeunes en tee-shirt imprimés du slogan « Un autre monde est possible ». 
On a besoin d’y croire. 
Le terme Altermondialiste s’invente.
Après tout, on peut se passer « des choses » : bagnole, fringues, téléphone …puisqu’on est venus avec juste une tente, trois duvets, un sac à dos, une gourde, puisque qu’on a marché des kilomètres depuis la voiture, à pied et sous le soleil pour être là.
« Le monde n’est pas une marchandise. »
On renoue avec l’authenticité. On s’exalte. Avec des centaines de gens on partage en un geste militant la soif, l’eau, l’inconfort, la chaleur. On expérimente la sobriété. Nos enfants se construirons dans ce modèle, on s’en persuade comme d’une évidence.
On partage le sort des réfugiés. Des réfugiés du capitalisme. 
150 000 personnes rassemblés sous 40 degrés, venues dire Non à la marchandisation de la santé, de l’eau, des services… Non à L’OMC et à sa gestion anti démocratique. Partout des conférences, une fournaise d’idées, une ébullition de propositions. 
C’est une grande fête.
Une foule venue commémorer une victoire après des années de lutte sur ce plateau. Une foule venue soutenir le chantre de la désobéissance civile : José Bové. 
Le soir il prend la parole, il sort de prison pour avoir arraché des plants OGM. Pour nous protéger de ce fléau.  Il parle de sa voix ferme et douce. De la prison, pas une plainte, non, mais de ses compagnons de cellule, de la solitude, de la condition des prisonniers. Il est amaigri mais debout.
Il remercie de son accent aveyronnais les camarades venus le soutenir chaque jour à l’extérieur de la prison, l’importance de leur voix de l’autre côté des murs, pour ne pas céder au découragement.
On est très émus.
D’autres camarades ont été aussi jetés en prison pour avoir démonté un  temple de l’impérialisme Américain, un MAC DO. Une insulte pour Millau. Une domination toxique pour le monde entier.  
A la nuit, les enfants s’endorment sur  les paroles de Manu Chao au loin :

«  Clandestino…
Correr es mi destino
Para burlar la ley
Perdido en el corazon
De la grande babylon  »

Et nous euphorisés de vivre intensément ce moment solidaire, historique; on tarde à céder au sommeil avec cet air qui nous trotte dans la tête :

« Je dormais à poings fermés… »
Je rêvais d'un autre monde
Où la Terre serait ronde
Où la lune serait blonde
Et la vie serait féconde »



Christiane

Consigne : 45 lignes, thème libre



 

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