On la chercha inlassablement, dans les rangées de vignes tout d’abord, puis dans les chemins alentours, on la chercha chez les voisines. On leur parla de sa disparition fantasque. Personne ne l’avait aperçu. On continua plus au creux de la campagne, dans les champs d’herbes sauvages maintenant.
Puis on pensa à la ville, on craignait les voitures et leur allure violente.
Le soir venu il fallut bien se résigner a rentrer.
Enfin, une voix au bout du fil, nous délivra et nous chavira tout à la fois.
Demain, on irait encore et encore la visiter dans cet asile. On la retrouverait dans le grand jardin ou maintenant, elle se sentait tout à fait chez elle .
Je franchis le pont de l’Île de la folie, le gardien m'ouvre la barrière. Sous le châtaignier, dans ses volutes de fumée, toute entière absorbée dans la contemplation du jardin, son pinceau et ses tubes de couleurs.
Prudemment, je m'approche : « Me voilà, comment ça va ? »
Elle me montre un portrait un peu baroque, de grandes flaques de couleurs dessinent un visage de femme couronnée de fleurs extravagantes .
« Enfin ! Tu en a mis du temps ! Tu vois, je suis de retour, comme toujours on m’attend ici, ici je peux parler, dessiner, réfléchir. Tu n’as pas mis ta blouse blanche ? ».
Avec l’impatience d’une enfant, elle m’entraîne dans le parc abandonnant pinceaux et couleurs.
On marche au gré de ses envies, indifférente au vent qui secoue les ombres des grands châtaigniers.
« Qu’est ce que tu t’es imaginé ? Que j’irais le chercher au fond du puits le peigne ? Ou peut-être que j’allais la pousser la petite ? Toujours à imaginer des choses extravagantes ! Tu dérailles ! Des délires de maniaques dans cette famille ! Vous devriez venir vous aussi, vous reposer ici de temps en temps ici. Toi, tu pourrais en écrire des histoires, de tes histoires tordues . »
Dans les allées, des égarés bras ballants, je vois un homme qui marche à la recherche d’un morceau de rêve, un autre appelle quelqu’un sans trêve. Un autre de grosses larmes coulent sur ses joues, certains jouent aux cartes et d’autres encore rient sans raison et fument à la folie.
« Ici, le jardin est tranquille, les fleurs n’ont pas d’épine, je peux leur parler. »
On revient sur nos pas, on passe le pont de pierres qui enjambe la rivière, elle m’entraine vers le vieux bâtiment, le pavillon le plus ancien, un peu délabré, aux murs patinée par le temps. Elle a fabriqué au creux d’une pierre, un autel de fleurs, elle a entouré les fleurs d’encens et de bougies. Elle est retournée au passé perdu, toute entière habitée par les souvenirs imaginaires .
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