Présentation

L’Atelier d’écriture de Solliès-Pont a commencé en septembre 2018 à l’initiative de Tristan Choisel, auteur de théâtre et de chansons. Pourquoi ? Pour s’initier à l’écriture de formes brèves (nouvelles, saynètes…), pour perfectionner son style ou pour simplement explorer son potentiel créatif. Nous sommes sept à partager nos textes dans la bienveillance, un peu d’humour et toujours avec beaucoup de plaisir. L’association « L’Atelier de Solliès-Pont » abrite cette initiative et vous pouvez nous rejoindre si, comme nous, vous avez l’âme d’un écrivain amateur.

Ce blog est la mémoire de notre travail. Il sert à mettre en lumière quelques-uns de nos textes. Enfin, il permet de communiquer entre nous plus facilement.

dimanche 31 janvier 2021

Débranche

Premier jour, l’obscurité a vampirisé la lumière. La gorge nouée je dois surmonter dans le noir, l’isolement qui m’enveloppe. Je trésaille dans la pièce ou je suis enfermée, en entendant la porte s’ouvrir. Quelqu’un s’approche de moi et me susurre à l’oreille « J’ai posé un bouillon de légumes sur la table de chevet ». La porte se referme, l’homme est sorti sans une autre parole, il a disparu dans le noir, dévoré par les ténèbres. Le deuxième jour, je m’étonne d’être finalement aussi à l’aise pour me repérer dans le noir et que ne pas discuter, me fais tellement de bien. Je m’étonne même que le jeûne passe sans difficulté. L’obscurité ne me fais plus peur et je n’appréhende plus de sombrer dans son abime. Troisième jour, je fais le point sur les derniers évènements douloureux, quels sens leurs donner et donner à ma vie. Dans la soirée du quatrième jour, l’homme vient me chercher, je n’ai plus la notion de temps. Dans le salon au coin d’un feu, je m’assieds sur le canapé rouge auprès des autres stagiaires. Avec notre maître, nous échangeons sur cette expérience "isolement et jeûne dans l'obscurité". Demain, libéré, j’embrasserai l’autre face du monde : La lumière.

 
 
Consigne : D'écrire une fiction de 12 lignes qui se passe dans l'obscurité (au sens propre).
 
 
 

samedi 30 janvier 2021

Un personnage

Philippe disparait derrière la volute de fumée de sa cigarette. Sur le plateau télé, les journalistes, les spectateurs, s’écharpent autour de lui. Il est au centre du débat et au-dessus de la mêlée.

Certains le trouvent sympathique, poétique et en avance sur son temps. D’autres le considèrent misogyne, provocateur et réactionnaire.

Philippe attend son tour. Il saura au moment opportun lancer sa flèche qui fera mouche. Son verbe habile relancera une polémique qui dopera l’audimat et  la vente de son dernier roman.

D’où qu’on se place, qu’on l’aime ou qu’on le déteste, il a une telle aura qu’un puissant a même décidé de le décorer.

Loin des codes habituels du paraitre en société, il sait se présenter le cheveu gras, la mine défaite, la chemise hors d’âge. Et si on le pousse un peu trop dans ses retranchements, il sort son joker : il enlève son dentier et le pose sur la table.

Mais qui est-il vraiment ?

Sa propre mère le fustige. A cela comment survivre ?

Son nom est un pseudonyme.

Philippe se met en scène. Au-dessus de la mêlée, et tel le phénix, il renait des cendres de sa cigarette.

 

 

 

Consigne : Créer un personnage (en vous inspirant plus ou moins de l'un des personnages apparaissant dans votre dernière ou votre avant-dernière fiction), et le présenter en 12 lignes (de façon si possible plaisante à lire - pas une description trop clinique).

 

Le mur du jardin de mamie

D’un âge ingrat et immature, ils sautent le mur du jardin de Mamie et s’aventurent dans le jardin du voisin. Leur espièglerie est préparée avec minutie. Ils s’emparent de l’épuisette posée près du bassin, puis ils pourchassent les poissons rouges, alanguis, du petit bassin et les voyagent dans le grand bassin. D’abord interloqués, puis, heureux du grand espace, les poissons rouges batifolent. Le voisin surgit. Vite, les enfants enjambent le mur avant qu’il ne les voit et retournent dans le jardin de Mamie. Les enfants lorgnent amusés, à travers un trou du vieux mur, la réaction de celui-ci. Le voisin interrogatif, soulève sa casquette et caresse sa calvitie. Il saisit l’épuisette et les poissons nomades réintègrent le petit bassin, désillusionnés. Les enfants jubilent. Aïe! Mamie les a vu, ils seront encore punis de jardin trois jours.


 

 

En 12 lignes, une fiction qui s'inspire (plus ou moins) de votre texte "chanson", et dans lequel il ne sera plus du tout question de chanson (d'aucune chanson).

 

 

 

Troublante presque inconnue

Depuis avant-avant- hier, une fascinante inconnue passe dans la rue et devant ma fenêtre et toujours à la même heure. Pour une personne juchée sur des talons hauts, elle marche étonnamment vite. Quand elle passe, je la filme avec mon smartphone et je la visionne avant que ne vienne Delphine. Delphine est vive, adorable et affectueuse mais entre elle et moi la routine s'est installée. Assis sur le canapé, nous regardons la télévision. Elle utilise mes cuisses comme appuie-tête et je caresse ses cheveux châtain tout en pensant à la blonde qui passe devant ma fenêtre. Delphine, tu es très jolie mais la plupart du temps tu portes une veste et des pantalons en Jean et ce soir tu me gâtes avec ton t-shirt trop large.

Comme chaque jour, à cet instant, voici ma blonde fatale dans sa petite robe noire, laquelle souligne ses courbes parfaites. Cette fois, c'est décidé, je sors. Je la rattrape et je l'accoste. Enfin, je vois son visage. Delphine ! Elle retire son blond postiche et expose à la caresse de l'air sa chevelure châtain.
"Eh oui, Delphine que tu négliges. C'est le seul moyen pour que tu t'intéresses un peu à moi", me dit-elle.
Avant qu'elle ne joue à la blonde, je n'avais même pas remarqué comme ses jambes sont belle ni su déceler la déesse en elle.



 
 
Consigne : texte s'inspirant d'un texte s'inspirant d'une chanson, sans référence à celle-ci. 
 
 

Nuit blanche

Je vais passer une nuit blanche, c'est le mariage de mon amie Fatima. C'est un mariage oriental, femmes et hommes soigneusement séparés. Entre femmes, on discute, on mange, on danse. Puis à minuit, subitement les mariés s'éclipsent dans une chambre de l'appartement. Les femmes s'excitent, les hommes les rejoignent. Tout d'un coup un linge sanglant est brandi par une vieille femme sans aucune pudeur. Les youyous se déchaînent, les hommes trépignent. Je suis dans la sidération, profondément étrangère à ce qui se passe. Je n'y comprends plus rien. Ma meilleure amie est drôle, intelligente, insolente. En une soirée notre complicité provocatrice tissée pendant toute notre adolescence s'effondre. Je me sens trahie.




Consigne : en 12 lignes, à la toute fin d'une fête.  
 
 
 

Lune noire

Couvre-feu à 18h et lune noire. L’obscurité est presque totale. Je prends mes clés et suis leur forme avec mes doigts pour trouver la bonne, puis je cherche à tâtons la serrure et j’essaie d’emboiter l’une dans l’autre. J’hésite, je bidouille, je dérape, je rétablis. La clé pénètre et tourne, la porte cède. Trouver l’interrupteur. Que la lumière soit ! Éclair fugace. Pschitt ! Ça a sauté. Nous voilà bien. Trouver le compteur électrique, bras en avant vers le garage, enjamber le fatras sans trébucher, atteindre l’armoire magique, chercher le bouton, appuyer, déclencher. Résultat : néant.

Depuis le temps que je m’interrogeais : et si j’étais née aveugle ? Ou : et si victime d’un jet de Flash-Ball dans une manif, j’avais perdu l’usage de mes deux yeux ?!… Il faut dire que les scénarios improbables et malheureux m’émoustillent. Et bien la voilà mon expérience rêvée ! Sentir la vie sans la voir, avec quatre sens ! Les aiguiser, ressentir plus fort.  La vie à pleines mains, à plein nez, à pleines oreilles, à pleine bouche. Expérience sensitive, sensuelle et spirituelle, oui spirituelle ! Tel un derviche tourneur, je me mets à tourner doucement dans le noir, les bras en balancier, la robe en toupie, plus vite, encore plus vite ! Vers la transe.

Toi tu es le chat, tapi dans l’ombre près de ta cabane à crottes :

- Mais que t’arrive-t-il Maîtresse, à jouer les libellules folles ?! Attention ! Ton sens de l’équilibre n’est pas le mien !  Et voilà tes pieds qui ripent et qui me bousculent. Vlan, patatras ! Miaou ! Mais tu as décapité  ma cabane à crottes ! !!

 

 

Consigne : Écrire une fiction de 12 lignes qui se passe dans l'obscurité.

 

 

 

Père Noël

 « Père Noël passe par la porte, lorsqu’il n’y a pas de cheminée », me dit Maman. Papa n’est pas encore rentré, il est de garde à l’hôpital. Il est minuit, Maman m'autorise à attendre Père Noël. Je m’assois en haut de l'escalier sur le palier au deuxième étage. Après dix bonne minutes, j'entends la porte vitrée de l’entrée de l’immeuble, s’ouvrir. Les feux d’artifice de la rue illuminent l’entrée en rouge, bleu, jaune . Je me tiens à la rampe et j’épie par la cage d’escaliers Paul qui rentre avec sa femme. Ils sont très joyeux et ont du mal à grimper au premier étage. Papa et Père Noël ne sont toujours pas là. Un temps se passe et une porte s’ouvre au troisième étage de l’immeuble, je monte quelques marches et je vois Père Noël dans son bel habit rouge embrasser Elsa, l’amie de maman, sur la bouche. Je rentre tout excité, le confier à maman « Elsa connait bien le Père Noël, elle l’a embrassé sur la bouche ». Je retourne vite sur le palier, le Père Noël descend l’étage et se trouve juste devant moi. « Mon petit Nino, que fais-tu sur le pallier, il ne fait pas chaud, viens rentrons, j’ai des cadeaux pour toi dans ma hotte ». Je suis très fier de rentrer dans l’appartement, main dans la main avec le Père Noël. Mais je ne comprends pas la réaction de Maman, elle pleure et gifle Père Noël ?







Ecrire une fiction de 12 lignes dans laquelle il sera question d'une fuite.

Camille

Ce soir là, Camille venait de me parler deux heures d’affilés d’un ton exalté. Son esprit bouillonnait, ses paroles fusaient par association d’idées, des illusions de la mémoire. Tandis que de sa main gauche, elle ébouriffait à intervalles régulier sa belle chevelure brune bouclée, sa main droite piochait dans le paquet épicé et doré de Camel, vérifiant de façon obsessionnelle que sa réserve délicieuse ne s’épuisait pas dans son sac à main.
Retranchée dans sa tour d’ivoire enfumée, arrogante, elle était inatteignable. Dans son beau regard noir égaré, quelques fulgurances sauvages émergeaient derrière le halo de sa fumée. Son doux sourire se changeait subitement en un rictus acide.
Depuis si longtemps elle braconnait le bonheur sans entrave, retournait sa vie dans tous les sens, ses amours étaient en pointillés, elle ne s’attardait jamais dans un job. Elle n’emprisonnait pas son argent, elle le flambait.
C’était une jolie femme charismatique, aussi impertinente que fantasque. Elle portait du haut de ses cinquante ans, une jupe et un foulard indiens, des bagues marocaines, témoins de cette époque insouciante ou elle avait bourlingué avec son amie. Sa silhouette était encore celle d’une adolescente.
Mais depuis quelques semaines son humeur changeait si vite encore qu’elle nous déroutait.
C’était la fin du jour, ivre de paroles, elle se leva chancelante pour rentrer enfin chez elle.



Consigne : portrait d'un personnage tiré de l'un des deux textes précédents.  
 
 
 

mercredi 27 janvier 2021

L'heure bleue

Elle trouvait refuge chaque hiver dans une cabane au milieu de l’immensité glacée, à quelques mille kilomètres du pôle nord, là-bas en Norvège. Cela faisait dix ans qu’elle explorait l’Arctique. Elle s'y était entraînée. L’hiver, c’était un crépuscule permanent : la nuit polaire. Souvent, elle partait à l’heure bleue, vers midi, une légère clarté l’accompagnait, puis à trois heures les ténèbres revenaient. Elle prenait la piste vers ce glacier qui l’aimantait. La magie givrée opérait. Ce jour-là, elle partit un peu plus tard dans l’après-midi. Elle suivit scrupuleusement la piste mais un vent mauvais se leva, la surprit de face. Des tourbillons neigeux venaient se coller à ses lunettes, brouillaient sa vue. Elle eut froid, de plus en plus froid. Dans la solitude et le silence de cette nuit d’encre, soudainement la tristesse l’envahit. Cent jours qu’elle n’avait pas vu le soleil. Elle se résolut a rentrer, mais au moment ou elle allait rebrousser chemin elle remarqua une masse mouvante devant elle, qui apparaissait, disparaissait dans le halo de sa lampe frontale. Une vision fugitive, peut être le fruit de son imagination embrumée. Puis elle devina les contours de la fourrure blanche sur le blanc de la neige, finit par distinguer le museau noir qui humait l’air, puis le vit avancer vers elle avec la souplesse d’un félin. Elle se figea devant l’ours blanc, n’essaya même pas de sortir sa fusée éclairante pour l’effrayer.
Elle ne lutta pas dans la nuit polaire.



 
Consigne : dans l'obscurité. 
 
 
 

Cache-cache

Je vis au château de Versailles. Quelle chance ! Tout cet espace, toute cette verdure, ces grandes prairies que je parcours en tous sens mais que par en dessous. De quoi être bien occupée. D’ailleurs, il faut que je me dégourdisse les pattes et que je me restaure. Ah oui ! j’ai oublié de vous dire. Je suis une petite taupe. Bon, je sens que le printemps est là. La terre est plus chaude et plus molle, je vais pouvoir me déplacer plus facilement. Voyons, où vais-je aller ? Là, ça me paraît bien. Je gratte, je gratte, je tasse la terre sur les côtés pour stabiliser ma galerie et je la pousse devant moi jusqu’à apercevoir la lumière, mais je ne vais pas plus loin. Après c’est l’inconnu. En chemin je vais bien trouver de quoi manger. Oui, là, des vers de terre. Hum, que c’est bon. J’avance encore un peu, mais zut le tunnel est bouché. C’est encore ce jardinier qui veut me tendre un piège. Pourtant il devrait être content. Je lui rends service. J’aère la terre, je mange les vers de terre, l’eau s’écoule mieux grâce à moi. Mais il ne m’aura pas. Demain, je creuserai une autre galerie !



 
Consigne : sur le thème de l'obscurité. 
 
 
 

vendredi 22 janvier 2021

Fuite

Fuite : je trouvais que c’était un bon titre.

Restait à dérouler l’histoire. Cette fois j’allais m’en donner les moyens, cette histoire-là ne tournerait pas court. Sur un grand tableau, je lançai plusieurs idées :

-La fuite provoquée d’une information secret défense, pour un roman d’espionnage,

-la fuite imprévisible dans un réacteur nucléaire nouvelle génération, pour un roman post apocalyptique,

-la fuite organisée d’une prison de haute sécurité d’un chef djihadiste d’Al-Qaïda pour un roman islamo-droitiste,

-la fuite incontrôlée de mon liquide séminal en pleine déroute libidinale, pour un roman sentimentalo-pornographique, …

J’aurais pu continuer ainsi longtemps. Une sorte de fuite en avant. Il aurait fallu décider, il aurait fallu construire. Mais comme d’habitude, mon récit s’orientait en miroir de mon âme grise et tourmentée. Et comble d’une fuite que j’eus voulue salvatrice, il allait se terminer dans un noir marécage d’encre dégoulinante. Une première dans mon parcours de looser.

La fuite de mon stylo.


 
 
 
 
 
Consigne : Écrire une fiction de 12 lignes dans laquelle il sera question d'une fuite. 
 
 
 

lundi 18 janvier 2021

La folie des grandeurs

Camille est arrivée chez nous à la nuit tombée, gaie et volubile. Elle avait mis du rouge à ses lèvres, du noir sur ses yeux, des rubans de couleurs à ses cheveux. Elle a fumé, beaucoup fumé. Elle a parlé, beaucoup parlé. Elle a dit des choses pas banales qui nous ont semblé un peu étranges. Camille s’est exaltée, puis elle a voulu écrire, on lui a donné de l’encre et du papier. Elle a écrit sans trêve et sans répit des choses énigmatiques. Puis est repartie, n’a plus dormi pendant des nuits. Le jour elle marchait jusqu’à se consumer de fatigue. Elle nous revenait chaque soir, et chaque soir plus enfiévrée nous parlait de ses nuits sans sommeil, de ses journées éreintantes. Puis a menacé de faire du tapage à propos de choses bizarres. Elle a dit qu’on communiquait avec les ordinateurs, qu’on pénétrait ses pensées, mais qu’elle ne se laisserai plus faire. Elle s’enflammait jusqu’à l’épuisement. Puis la voisine a dit « mais elle fuit de la cafetière. »



 
Consigne : thème de la fuite.

mardi 12 janvier 2021

La lune

La lune est magnifique ce soir. Nous sommes quelques amis à la contempler, un verre de champagne à la main. Tous gardent un souvenir magique de l’évènement. Tous racontent à leur façon comment ils l’ont vécu avec toutefois beaucoup de choses en commun. Tous s’étaient réveillés en pleine nuit pour y assister. Tous étaient rivés à leur poste de télévision noir et blanc. L’attente avait paru interminable et tous étaient restés incrédules devant l’écran qui renvoyait ces images tremblotantes et irréelles.

Nous sommes le 21 juillet 2019, il est 2h56 du matin et nous trinquons. Avec beaucoup de nostalgie nous évoquons ce moment inoubliable, il y a 50 ans, quand l’humanité toute entière rassemblée dans un même élan de fraternité et d’allégresse réalisait qu’elle venait d’accomplir l’un de ses rêves les plus fous. Avec beaucoup de tristesse nous constatons que le songe aura été de courte durée et que cette belle lune que nous contemplons ce soir ne fait plus rêver l’humanité.



Consigne : une fiction de 12 lignes qui s'inspire du texte précédent (historique) mais qui se passe cette fois-ci de nos jours.

 

 

Dr Fleming

Il termine le dernier compte rendu de la journée. Un petit clic, envoyé. Il fait basculer le fauteuil en arrière, s’étire en soupirant, dépose son stéthoscope sur le bureau et se masse les cervicales. Un coup d’œil à l’horloge de son ordinateur, il est 21h15. Encore une de ces journées trop remplies, trop intenses en émotion, trop complexes, trop tout. Le doute s’installe comme à chaque fois qu’il est fatigué. Quel foutu métier. Mais pourquoi l’avoir choisi ? A cette question mille et une fois posée, il connaît la réponse : parce que c’est toi. Incapable de faire autre chose. Ce job te remplit, te nourrit, te fait grandir et tu le sais. Accueillir le sourire de ces enfants en souffrance est une chance qui te comble. Il est là, ton véritable salaire, ta reconnaissance. Il tapote de ses doigts le bureau, se caresse le menton et soupire à nouveau. Allez, il te faut rentrer, il se fait tard et tu as besoin de tout l’amour de ta famille pour faire le plein d’énergie avant de retrouver tes patients.





Consigne : En 12 lignes, une fiction qui s'inspire (plus ou moins) de votre texte "chanson", et dans lequel il ne sera plus du tout question de chanson (d'aucune chanson).

dimanche 10 janvier 2021

Premiers pas

Il est 2h30 du matin. Papa me réveille en me secouant gentiment l’épaule. J’ai un peu de mal à faire surface. Puis, tout me revient : c’est le jour « J ». Je saute hors de mon lit et court, pieds nus, dans le salon rejoindre toute la famille qui est déjà installée devant le poste de télé. Excitation, attente. Cela fait des semaines que nous en parlons. Nous avons eu droit à plusieurs cours sur le sujet et sommes devenus incollables sur le programme américain Apollo 11 et son équipage. En ce qui me concerne, j’ai un petit faible pour Neil Amstrong. Il est plutôt beau garçon et puis, c’est lui, le commandant. Il m’impressionne. Depuis le lancement de la fusée Saturn 5 le 16 juillet, nous avons suivi cette mission avec enthousiasme et dans une euphorie générale totale. Quelquefois, jugeant cette expérience tout à fait incroyable, je me suis demandée si cela était vraiment réel. Malgré une courte nuit, ce matin je n’ai plus aucun doute. Tandis que le sigle de l’ORTF apparaît sur l’écran de notre vieux poste noir et blanc, je jette un dernier coup d’œil à mes parents, frères et sœurs. L’émotion est palpable, le silence surprenant. Nous savons tous que nous allons vivre un évènement exceptionnel qui restera gravé dans toutes les mémoires.

 

Consigne : écrire une fiction de 12 lignes mettant en scène un ou plusieurs personnages de fiction au cours d'un évènement historique connu (remontant à plus de cinq ans - vous n'avez pas le droit au vote en faveur du Brexit ou au premier confinement !

 

 

Station Châtelet Les Halles

La foule est dense. Les gens se croisent, se bousculent, rapides, pressés, innombrables. Le brouhaha est incessant, l’agitation folle. Un mélange d’odeurs irrite les narines. Soudain, une voix de ténor s’élève. Quelques personnes se retournent surprises. La voix s’amplifie et porte plus loin. Un homme, au milieu de la foule, se tient immobile. Sa voix est forte, puissante. Un peu inquiets, les gens le regardent et l’évitent. Imperturbable, il continue. Deux autres personnes le rejoignent et reprennent avec lui cette chanson napolitaine si connue : « Funiculi, Funiculà ». C’est bientôt tout un groupe de chanteurs qui se retrouvent au milieu de l’affluence à reprendre en chœur le couplet. Ils ont du talent et plusieurs personnes s’arrêtent pour les écouter. Certains sortent leur portable pour prendre quelques photos. Peu à peu, la foule s’apaise comme envoûtée par cette belle musique si insolite dans ce lieu agressif. Les gens sourient, se parlent et reprennent en chœur le refrain entraînant. Le temps est suspendu dans un beau moment de partage.





Consigne : écrire une fiction (comme d'ordinaire de 12 à 15 lignes maxi) faisant intervenir beaucoup de personnages, le plus possible.



mardi 5 janvier 2021

Joli mois de Mai

Drapeaux noirs, affiches, banderoles, même les blousons noirs sont venus rejoindre les manifestants. Tous assis par terre, nous écoutons les syndicats, nous incitant à manifester et à rejoindre leur mouvement. Au fils des heures, les projets se précisent et les manifestations sont programmées. Les discussions animées durent toute la journée : plus de cours, autodiscipline, mixité dans les collèges et les lycées, tout doit-être remis à neuf… Les jeunes claironnent que le Père de Gaulle et Tante Yvonne, ne sont plus les bienvenus et aboient contre les ancêtres. Avec Bernadette nous avons un peu peur, mais nous ne le montrons pas. Je suis toujours super obéissante, Bernadette un peu moins. Après le départ des syndicats, les collégiens excités cassent les vitres, les bancs et bureaux. Les CRS prévenus par les habitants du quartier apeurés, essaient de calmer les jeunes, mais la furie monte de plus en plus et les CRS font éclatés des bombes lacrymogènes et matraques les jeunes les plus féroces. Nos yeux larmoient, c'est la révolte. A dix-sept heures, les manifestants se dirigent vers le centre-ville en chantant et rejoignent les lycées, les travailleurs, les syndicats. Avec Bernadette, la peur au ventre, profitant de la débâcle générale, nous fuyons jusqu’à l’arrêt du car avec une allure de jeunes filles de seize ans, désarmées, épuisées, subjuguées. Peur, joie, excitation, des sentiments contradictoires nous animent. Que s’est-il passé ? que venons-nous de vivre ?




fiction de 12 lignes, mettant en scène un ou plusieurs personnages de fiction au cours d'un évènement historique connu (remontant à plus de cinq ans - vous n'avez pas le droit au vote en faveur du brexit ou au premier confinement !)
 
 

A bas les masques

« Pas plus de cinq dans le magasin. La distanciation et le port du masque sont obligatoires ».

1e client- Non mais quel cirque, on se croirait au bal masqué !

2e client- Eh bien, moi je préfère respecter les consignes, je n’ai pas envie de l’attraper »

1e client- Vous ne voyez pas qu’ils nous infantilisent, ils nous prennent pour des cons »

2e client- Eh bien ! je préfère être un con en bonne santé, qu’un mort intelligent.

1e client- Non, j’y crois pas, vous gobez tout ce qu’ils disent, l’augmentation des cas, les hôpitaux surchargés, que du bourrage de crâne. Venez donc à la conférence, ils vont vous expliquer : Comment va notre économie, le trafic avec les laboratoires, que du bizness. Il y en a marre, Macron avec sa Cougar ne sont plus les bienvenus.

2e client- Non mais, même chez le primeur on se fait agresser. Foutez-nous la paix. Contre les virus je ne sais pas ce qu’il faut faire. Moi la révolution je l’ai faite en mai soixante-huit

Bernadette, son couffin à la main, me dit « ça me rappelle un jour de mois de mai 68 au collège. De toute façon, virus ou pas virus, on se fera toujours plumer. En parlant de plumer, je mange des alouettes sur tranches de pains grillés à midi, chassées avec le miroir par mon mari. Et toi ?

- Moi, de la dinde.

 

 

Fiction de 12 lignes qui s'inspire du texte précédent (historique) mais qui se passe cette fois-ci de nos jours. 



La belle Cassandre

Comme chaque dimanche, tantes, grand-oncle, neveux, nièces, se retrouvent autour d’un apéro dinatoire, chez la Tante Anémone.

 

VIRGINIE, l’amie de Johnny : Avec Johnny, nous allons nous marier, vous êtes tous invités.

La Tante ANÉMONE : Eh bien ! Johnny tu ne pourras plus reluquer la belle Cassandre.

VIRGINIE : Quelle Cassandre ? Qu’est-ce qu’elle raconte l’Anémone ?

La tante ANÉMONE : L’Anémone, te met au courant.

La Tante MARIETTE : Bon, on se calme, à partir d’aujourd’hui, ne regardez que votre avenir ensemble.

Le neveu JOHNNY : Tu as raison Tata, à la belle Cassandre, je lui crache à la bouche. Partons d’un bon pied et oublions le passé.

Le neveu DAVE : La jumelle de Cassandre, tu l’as vue, un véritable canon.

JOSY, la femme du neveu Dave : Ne vous mariez pas, vous ne resterez pas ensemble.

La Tante MARIETTE : Si l’on parle de prédiction, ça va virer en eau de boudin.

JOHNNY : Dave, sers-moi un autre jaune.

Le neveu DARIO : De toute façon, la belle Cassandre préfère rester seule, personne ne l’aura.

LALIE, la femme du neveu Dario : Pourquoi, toi aussi, tu la connais ? Virginie, buvons un coup.

Grand-Oncle NÉNÉ : Allez les filles, buvons, ça fait poussez les nichons.

On sonne, la Tante Anémone va ouvrir la porte.

Oh ! Cassandre.

 

 

Fiction 12 à 15 lignes mettant en scène beaucoup de personnages, le plus possible.

 

 

 

samedi 2 janvier 2021

La ville des ponts suspendus

Sur Tripadvisor vous pouvez réserver pour 60,31 € un tour de la cité en deux heures. Au départ du Cirta Museum, vous visiterez le pont El Kantara, attraction nationale populaire. Votre guide professionnel vous conduira au pont Sidi M’Cid d’où vous bénéficierez d’une vue exceptionnelle. A la boutique Djawzia Cirta El Bey, vous trouverez le jawzia, nougat à base de noix parfumé à la vanille et au miel. Assurez-vous au préalable que vous avez un visa valide. Cliquez pour réserver.

Anaïs clique et sort sa carte bleue.

Dans une semaine elle sera donc là-bas, à Constantine. Dans  la ville des ponts suspendus,  c’est  une nouvelle mission de l’association franco-algérienne Ashifa qui l’attend : ravitailler le CHUC Ben Badis  en matériel et équipement médical, spécialement pour son service Covid : masques chirurgicaux, blouses stériles, gants, lunettes à oxygène, tensiomètres, cathéters, filtres,  humidificateurs…

Toujours sur Internet, elle consulte des articles récents et plus anciens du quotidien El Watan pour s’informer sur l’actualité locale. Régulièrement le journal met à l’honneur un  des combattants décédés en martyr dans la wilaya de Constantine dans les années cinquante. Maurice Papon était alors inspecteur général de la ville et préfet de l’est algérien. L’humanisme n’était pas de mise.

 

 

 

Consigne : Ecrire une fiction de 12 lignes qui s'inspire du texte précédent (historique) mais qui se passe cette fois-ci de nos jours.